Pressions et stratégies dans la formation professionnelle universitaire : Le cas de la formation des directions d’établissement scolaire au Québec

  • Mercredi 23 octobre 2013 de 11 h à 13 h
  • UdeM - Pavillon Marie-Victorin B-328 90, avenue Vincent-d'Indy Montréal, QC Canada H2V 2S9

Conférencière/Conférencier

Photo de David D'Arrisso

D'Arrisso, David

Description

Les formations professionnelles universitaires (FPU) sont confrontées à des pressions diverses et souvent contradictoires. Si les écrits scientifiques sur les FPU témoignent bien de cette réalité, ceux-ci nous informent moins bien de la manière dont les unités responsables de ce type de formation répondent à ces pressions. Cette thèse a donc fait appel à plusieurs concepts de l’approche institutionnelle issue de la sociologie des organisations pour analyser l’évolution récente de la FPU destinée aux directions d’établissement scolaire (DES) du Québec, un champ qui a connu d’importantes transformations au cours des vingt-cinq dernières années. Construite sur une étude de cas interprétative dite à « unités enchâssées », cette thèse s’est intéressée à l’évolution de cette formation dans deux unités universitaires francophones : le Département d’administration et fondements de l’éducation de l’Université de Montréal et le Département de gestion de l’éducation et de la formation de l’Université de Sherbrooke. Couvrant la période allant des années universitaires 1988-1989 à 2008-2009, elle repose sur une analyse de corpus documentaires et d’une vingtaine entrevues réalisées auprès d’informateurs-clés (doyens, directeurs de département/section, responsables de formation).

Les résultats montrent comment, au cours de cette période, les deux unités tendent à se rendre isomorphes à leur environnement, et comment cela se fait en réponse à des pressions institutionnelles et de compétition diverses émanant d’un champ organisationnel en pleine transformation. La formation dans les deux unités connaît des changements importants, dont plusieurs convergent autour d’une logique de professionnalisation, d’un archétype particulier de formation (un continuum de formation de 2e cycle, au cœur duquel se trouve un diplôme de deuxième cycle) et d’outils conséquents (conditions d’admission et populations étudiantes élargies; flexibilité dans la structure du programme et professionnalisation des activités; équipes enseignantes plus diversifiées). Ces deux unités n’apparaissent cependant pas impuissantes devant ces pressions : elles déploient un éventail de stratégies et de tactiques qui évoluent au cours de la période observée et visent surtout à gérer la situation de pluralisme institutionnel à laquelle elles sont confrontées, notamment entre les pressions externes de nature plus professionnalisantes, et les pressions intraorganisationnelles de nature plus académisantes. Celles-ci visent surtout à maintenir la légitimité de leur offre de formation devant ces pressions plurielles et parfois contradictoires. La nature de l’entrepreneuriat institutionnel en place détermine en grande partie ces stratégies. Or, cet entrepreneuriat, qui est au cœur de l’évolution de la formation, est en partie contraint ou, a contrario, stimulé par les choix historiques qui ont été faits par les unités et leur université, et par l’empreinte et les dépendances de sentier qui en découlent.

Ces résultats apportent un éclairage « institutionnaliste » sur la manière dont deux unités universitaires ont réagi, à une période donnée, aux pressions diverses provenant de leur environnement. Ils brossent un portrait complexe et nuancé qui vient à la fois (1) approfondir notre compréhension de cette spécificité des FPU, (2) approfondir notre compréhension de l’évolution récente de la FPU destinée aux DES québécoises, et (3) confirmer la puissance d’analyse de plusieurs concepts tirés de l’approche institutionnelle.